vendredi 24 juin 2005

Le Sénat adjuge un régime juridique aux enchères inversées

Passés un peu inaperçu, les articles 32 et 33 du projet de loi en faveur des petites et moyennes entreprises, examiné en début de semaine par le Sénat, souhaitent intégrer au sein du Code de commerce des dispositions destinées à encadrer le recours aux enchères inversées.

Pourquoi une telle volonté ? Aujourd'hui, ce procédé tend à se généraliser. Il permet en effet à l'acheteur de réduire ses coûts d'approvisionnement, d'élargir sa palette de choix, de proposer des procédures d'achat - normalement - plus transparentes. Autre facette de ce mécanisme : il peut donner lieu à des dérives plus ou moins graves : réduction de la qualité des produits (légèrement problématique en matière de construction d'immeubles), baisse de l'innovation, sélection inéquitable des participants, exigence d'une participation financières, diminution artificielle des prix, entente entre certains soumissionnaires, etc.

Résultat, le projet de loi PME prévoit plusieurs dispositions.

Tout d'abord, le texte prévoit, au sein d'un article L. 442-10 du Code du commerce, qu'est nul "le contrat par lequel un fournisseur s'engage envers tout producteur, commerçant, industriel ou personne immatriculée au répertoire des métiers sur une offre de prix à l'issue d'enchères à distance, organisées notamment par voie électronique" lorsque au moins l'une des règles suivantes n'a pas été respectées :

1°) Préalablement à l'enchère, l'acheteur ou l'organisateur de la vente pour le compte de l'acheteur doit communiquer de façon "transparente et non discriminatoire" à l'ensemble des candidats admis à présenter une offre les éléments déterminants des produits ou des prestations de services qu'il entend acquérir, ses conditions et modalités d'achat, ses critères de sélection détaillés ainsi que les règles selon lesquelles les enchères vont se dérouler.

2°) Au cours de la période d'enchères, l'acheteur ou la personne qui les organise pour son compte n'a aucune relation directe ou indirecte avec les candidats "au titre de cette négociation sauf, le cas échéant, pour résoudre les problèmes techniques survenant lors du déroulement des enchères". Cette précision, ajoutée lors du débat parlementaire, vise - outre le cas des problèmes techniques - la situation où "une partie du personnel de l'organisateur des enchères est détachée auprès de l'une des entreprises candidates - c'est le cas des constructeurs techniques". Cette disposition pourrait également permettre aux entreprises de continuer à être en relation avec d'éventuels soumissionnaires pour des contrats portant sur une toute autre prestation que celle négociée par l'entremise d'un système d'enchères inversées.

3°) A l'issue de la période d'enchères, l'identité du candidat retenu est révélée "au candidat qui, ayant participé à l'enchère, en fait la demande". Si l'auteur de l'offre sélectionnée est défaillant, nul n'est tenu de reprendre le marché au dernier prix ni à la dernière enchère. Sur ce point 3°), le projet de loi prévoyait que l'identité du candidat retenu devait être communiqué à tous les autres candidats. Estimant que cette mesure se heurte au principe de confidentialité en matière de négociation commerciale, les sénateurs ont restreint cette obligation en mettant en oeuvre une "communication à la demande". Ce filtre ne devrait pour autant pas constitué une garantie suffisante face à des soumissionnaires informés de la possibilité offerte par la loi.

Par ailleurs, il est prévu qu'un tiers certificateur s'assure, dans des conditions fixées par un décret, "de la réalité des offres présentées lors de ces enchères, qui doivent avoir pour objet de déboucher sur un contrat". Ce dernier devra effectuer un enregistrement du déroulement des enchères qu'il conserve pendant un an. Le rapport pourra être communiqué à toute personne ayant participé aux enchères.

Cette obligation fait suite à un souhait, pour les sénateurs, de faire un parallèle avec les ventes aux enchères électroniques où on fait intervenir un tiers (les sociétés de ventes volontaires, ex-commissaires priseurs) pour s'assurer de la régularité du dispositif. Cette mesure s'inscrit dans une volonté de lutter contre le sentiment "que les enchères relèvent plus du bluff ou d'une mascarade que d'un processus objectif de formation du prix par le mieux disant".

En outre, le texte interdit le recours aux enchères électroniques pour "les produits agricoles bruts non marketés". L'objectif de cette interdiction est de ne pas introduire un dispositif "où les producteurs agricoles seraient contraints de baisser indéfiniment leurs prix, alors qu'ils vendent déjà en majorité leurs produits en dessous de leurs coûts de production".

Le non-respect de ces règles a pour conséquence pour son auteur d'engager sa responsabilité et de réparer le préjudice causé. L'article 34 du projet de loi précise en outre que le fait d'opérer la hausse ou la baisse artificielle des prix de vente des produits par la diffusion de fausses offres est sanctionnée de 2 ans d'emprisonnement et de 30.000 € d'amende.

Enfin, l'article 32 du projet précise que "lorsque la rupture de la relation commerciale résultat d'une mise en concurrence" par le biais d'enchères inversées, une durée minimale de préavis "est double de celle résultant de l'application des dispositions [de l'article L. 442-6 I] dans les cas où la durée du préavis initial est de moins de six mois, et d'au moins un an dans les autres cas".

Pour aller plus loin sur ce sujet : Avis n° 04-08 de la Commission d'examen des pratiques commerciales relatif à la conformité au droit des pratiques d'enchères électroniques inversées.

1 commentaire:

Anonyme a dit…

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